L’électrocardiogramme (ECG) : un examen cardiaque essentiel

L'électrocardiogramme (ECG) est un examen médical non invasif et fondamental pour l'évaluation de la fonction cardiaque. Il enregistre l'activité électrique du cœur, fournissant des informations cruciales sur son rythme, sa conduction et la santé globale du muscle cardiaque. Son utilisation est omniprésente en cardiologie et en médecine générale pour le diagnostic et le suivi de nombreuses affections.

Développé par Willem Einthoven au début du 20ᵉ siècle (récompensé par un prix Nobel en 1924), l'ECG a considérablement évolué. Des appareils volumineux, il est devenu un outil portable et sophistiqué, facilitant le diagnostic et le suivi des patients, notamment grâce à l'analyse automatisée des données.

Déroulement d'un ECG : de la préparation à l'interprétation

L'examen ECG est rapide et relativement simple. Il commence par une préparation minutieuse du patient pour garantir la qualité de l'enregistrement et le confort du patient.

Préparation du patient

Le patient est généralement allongé confortablement sur le dos, les bras le long du corps. Il est crucial qu'il se détende et reste immobile pendant l'enregistrement (environ 10 secondes) pour éviter les artefacts – des perturbations du signal électrique qui peuvent gêner l'interprétation. Des explications claires et rassurantes du processus aident à la relaxation du patient.

Placement des électrodes

Dix électrodes sont placées sur la peau du patient : six sur la poitrine (dérivations précordiales V1 à V6), et quatre sur les membres (dérivations périphériques : bras droit, bras gauche, jambe droite et jambe gauche). Chaque électrode détecte l’activité électrique du cœur selon une perspective spécifique. Cette disposition permet une vision multi-angulaire de l’activité électrique cardiaque.

  • Dérivations précordiales (V1-V6) : Ces électrodes fournissent une vue rapprochée de l'activité électrique ventriculaire.
  • Dérivations périphériques (bras et jambes) : Offrent une vue plus large de l'activité électrique auriculaire et ventriculaire.

Le placement précis des électrodes est essentiel pour la fiabilité du tracé. Une mauvaise application peut engendrer des erreurs d'interprétation.

Acquisition du tracé ECG

L'acquisition du tracé dure environ 10 secondes. Durant cette période, l'appareil enregistre l'activité électrique du cœur, transformée en un signal graphique. La qualité de l'enregistrement est primordiale pour une interprétation précise. Des interférences électromagnétiques, des mouvements du patient ou une mauvaise connexion des électrodes peuvent créer des artefacts, nécessitant parfois une répétition de l’examen.

Interprétation préliminaire de l'ECG

Après l’acquisition, une analyse préliminaire du tracé permet d'identifier des éléments clés : la fréquence cardiaque (normalement entre 60 et 100 battements par minute au repos), le rythme cardiaque (régulier ou irrégulier) et l'axe cardiaque (la direction générale de la propagation de l'influx électrique). Un rythme sinusal normal est caractérisé par un intervalle RR régulier et une onde P positive précédant chaque complexe QRS.

Une déviation de l’axe cardiaque de plus de 90° peut suggérer une hypertrophie ventriculaire, tandis qu'une fréquence cardiaque anormalement élevée ou basse peut indiquer une tachycardie ou une bradycardie.

Décryptage du tracé ECG : ondes, segments et intervalles

Le tracé ECG est composé d'ondes (P, QRS, T, U) et de segments qui reflètent les différentes phases de l'activité électrique cardiaque. L'analyse précise de ces éléments est fondamentale pour le diagnostic.

Les ondes et le complexe QRS

L'onde P correspond à la dépolarisation des oreillettes, soit la propagation de l’influx électrique qui déclenche leur contraction. Le complexe QRS, plus ample, représente la dépolarisation ventriculaire, initiant la contraction des ventricules, la partie la plus puissante du cœur. L’onde T reflète la repolarisation ventriculaire, le retour à l’état de repos électrique des ventricules. L'onde U, moins visible et parfois absente, est liée à la repolarisation des fibres de Purkinje.

Intervalles et segments clés

L'intervalle PR (entre le début de l'onde P et le début du complexe QRS) reflète le temps de conduction auriculo-ventriculaire. Il doit mesurer entre 0,12 et 0,20 seconde. Un allongement de cet intervalle peut indiquer un bloc auriculo-ventriculaire. L'intervalle QT (du début du complexe QRS à la fin de l'onde T) représente la durée de la dépolarisation et de la repolarisation ventriculaire. Des variations de cet intervalle (allongement ou raccourcissement) peuvent prédisposer à des arythmies potentiellement fatales (torsades de pointes).

L'intervalle RR, la distance entre deux complexes QRS consécutifs, permet de calculer la fréquence cardiaque. Un intervalle RR régulier indique un rythme cardiaque régulier.

  • Fréquence cardiaque normale au repos : 60 à 100 battements par minute.
  • Intervalle PR normal : 0.12 à 0.20 seconde.
  • Intervalle QT normal : Variable selon la fréquence cardiaque (formules de correction existent).

L'axe cardiaque

L'axe cardiaque représente la direction générale de la dépolarisation ventriculaire. Sa détermination se fait en analysant la polarité (positive ou négative) des ondes QRS dans différentes dérivations. Un axe cardiaque normal se situe généralement entre -30° et +90°. Des déviations importantes peuvent témoigner d'une hypertrophie ventriculaire droite ou gauche.

Applications cliniques de l'ECG : diagnostic et surveillance

L'ECG est un outil diagnostique indispensable dans de nombreuses situations.

Diagnostic des arythmies cardiaques

L'ECG est essentiel pour identifier divers types d'arythmies cardiaques, incluant la tachycardie sinusale (fréquence cardiaque rapide), la bradycardie sinusale (fréquence cardiaque lente), la fibrillation auriculaire (rythme cardiaque irrégulier et rapide des oreillettes), le flutter auriculaire (rythme cardiaque rapide et régulier des oreillettes) et différents blocs cardiaques (perturbation de la conduction électrique dans le cœur). Chaque arythmie présente des caractéristiques spécifiques sur l'ECG.

Diagnostic de l'ischémie et de l'infarctus du myocarde

L'ischémie myocardique (manque d'oxygène au muscle cardiaque) et l'infarctus du myocarde (nécrose d'une partie du muscle cardiaque) modifient le tracé ECG. Des modifications du segment ST (sus-décalages, sous-décalages) et l'apparition d'ondes Q pathologiques indiquent une lésion myocardique. La localisation de ces modifications sur le tracé permet de localiser la zone du cœur affectée. Un infarctus aigu du myocarde provoque des modifications urgentes et significatives de l’ECG.

Surveillance des électrolytes

Les déséquilibres électrolytiques (potassium, magnésium, calcium) influencent l'activité électrique du cœur et se manifestent sur l'ECG. Une hypokaliémie (faible taux de potassium) peut causer un aplatissement de l'onde T, tandis qu'une hyperkaliémie (taux élevé de potassium) peut entraîner un élargissement du complexe QRS et des ondes T pointues. Des anomalies du magnésium et du calcium peuvent également modifier le tracé ECG.

Autres applications de l'ECG

L'ECG joue un rôle dans le diagnostic de maladies cardiaques congénitales (défauts septaux, malformations valvulaires), le suivi de l'efficacité des pacemakers (stimulateurs cardiaques), la détection de syndromes de pré-excitation (syndrome de Wolff-Parkinson-White), et même dans certaines pathologies pulmonaires (hypertension pulmonaire). L’ECG permet aussi une évaluation de l’hypertrophie ventriculaire, liée à une augmentation de la masse musculaire cardiaque.

Limites de l'ECG et examens complémentaires

Bien que précieux, l'ECG présente des limites.

Faux négatifs et faux positifs

L'ECG peut ne pas détecter certaines anomalies cardiaques (faux négatif) ou, à l’inverse, montrer des modifications qui ne correspondent pas à une pathologie (faux positif). Sa spécificité et sa sensibilité varient selon la condition cardiaque. L’interprétation doit toujours être corrélée au contexte clinique et aux symptômes du patient. L'ECG est un outil diagnostique parmi d'autres et ne doit pas être interprété isolément.

Examens complémentaires

L'ECG est souvent utilisé en complément d'autres examens pour un diagnostic complet. L'échocardiographie (échographie cardiaque) permet de visualiser la structure et la fonction du cœur. La coronarographie visualise les artères coronaires pour détecter des sténoses. Le Holter ECG, un enregistrement continu sur 24 heures ou plus, permet de détecter des arythmies intermittentes. D'autres examens tels que le test d'effort, l'imagerie par résonance magnétique cardiaque (IRM cardiaque) et la tomodensitométrie coronarienne (TDM coronarienne) peuvent également être nécessaires.

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